Le Liban, pays riche en eau par excellence au Moyen-Orient, est menacé par la sécheresse

salam wa kalam website logo
trending Tendance
Posté sur juin 14 2022 par Ali Awadah, Journalist 11 minutes de lecture
Le Liban, pays riche en eau par excellence au Moyen-Orient, est menacé par la sécheresse
Adra Kandil
La crise économique au Liban a posé de nombreux problèmes liés à la vie quotidienne, ciblant même les droits les plus élémentaires à l’eau potable ou à l’eau utilisable, compte tenu de l’absence de politiques étatiques de l’eau depuis des décennies.

De nombreuses familles se sont retrouvées obligées de se passer de l’eau potable en bouteille, faute de pouvoir d’achat, et l’ont remplacée par l’eau des puits domestiques qui comptent sur l’eau de pluie et l’eau de fonte des neiges. C’est une méthode que les ancêtres utilisaient pour stocker l’eau pendant l’hiver. L’eau était recueillie dans un puits creusé dans les soubassements de la maison ou à proximité, pour être restituée et retirée par plusieurs méthodes, notamment en attachant un récipient avec une corde et l’abaissant jusqu’au puits et le retirer une fois rempli., Dans la période entre l’époque de nos ancêtres et la nôtre, la science s’est développée, créant des méthodes avancées pour puiser l’eau, mais les craintes de ces familles sont restées concernant des contaminations virale ou bactérienne pouvant affecter l’eau, de sorte que certains ont eu recours à faire bouillir l’eau avant de le boire, en pensant qu’en faisant cela, elle pourrait devenir tout à fait convenable à boire et sans aucune impureté. Cette méthode n’a pas duré longtemps car l’augmentation du prix des bouteilles de gaz a rendu difficile de faire bouillir de l’eau et les gens ont effectivement repris l’habitude de boire l’eau potable sans la faire bouillir. Privés de courant électrique, d’autres sont retournés à la méthode de leurs ancêtres et ont en fait puisé de l’eau à l’aide d’un bol et d’une corde.

Dans un rapport publié par le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) début 2022, ce dernier a averti que l’infrastructure de l’eau au Liban avait atteint le point d’effondrement car le secteur de l’eau est affecté négativement en raison des faibles tarifs en livres libanaises, du coût élevé de l’entretien en dollars américains et de la menace de suspension qui persiste en raison du coût élevé du carburant. Compte tenu de tout ce qui précède, les institutions de l’eau n’ont pas été en mesure d’effectuer l’entretien requis à temps, ce qui a entraîné une augmentation des pannes d’infrastructures. Et on s’est inquiétés d’une crise profonde qui pourrait affliger ce secteur. Hussein Fakih, spécialiste des projets d’eau à l’UNICEF, estime que le Liban est meilleur que d’autres pays au Moyen-Orient en termes de richesse en eau, mais avec l’augmentation de la population, le Liban se rapproche du taux normal, considérant que son principal problème en eau est le gaspillage et l’absence de politique de rationalisation. De même, une grande partie de son eau est polluée, notamment dans les rivières.

Cependant, avec l’exacerbation de la crise économique, le coût de la production d’eau potable est devenu élevé pour de nombreux établissements, qui ont eu recours à des solutions alternatives à un moment où de nombreuses pompes ont cessé de fonctionner. L’aggravation de la crise de l’électricité a également affecté cette production.

Fakih a souligné que la non-exploitation des précipitations est un problème pour le Liban, car la proportion des précipitations pour l’année 2022 dépasse la moyenne et la terre a été irriguée par l’eau, mais une grande partie de l’eau ira à la mer en gaspillage. Avec les problèmes de changement climatique, l’absence de système de surveillance des sources et de rationalisation, et le taux de pollution des nappes phréatiques atteignant 92 %, nous pourrions atteindre le stade de la sécheresse en l’an 2040, car le Liban est situé dans la région la plus vulnérable et confrontée à un stress hydrique élevé. D’ici 2040, le Liban devrait figurer parmi les 11 pays ayant les plus hauts niveaux de stress hydrique au monde.

Malgré la gravité de l’affaire, il est possible d’éviter la catastrophe, en utilisant la quantité de précipitations, en évitant de gaspiller l’eau dans les rivières ou d’empiéter sur celles-ci, et en réduisant le niveau de pollution des eaux souterraines, et en restaurant les réseaux d’eaux usées.

Impacts du changement climatique sur la rareté de l’eau au Liban :

En raison des changements dans les précipitations et la fonte des neiges, le Liban devrait connaître une grande variation des débits printaniers, avec des phénomènes sévères et des périodes de sécheresse plus prononcées. L’UNICEF travaille avec les principales institutions de recherche au Liban (l’Université américaine de Beyrouth et l’Université Saint Joseph) pour surveiller les sources et les débits d’eau afin d’aider les décideurs en leur fournissant des données, qui seront communiquées à la direction correspondante. Cela comprend la cartographie des flux d’eau pour une meilleure compréhension des systèmes d’eaux souterraines. Ces informations permettront de mieux prévoir et planifier les ressources disponibles et futures. 

Le changement climatique, la rareté de l’eau et la dégradation de l’environnement peuvent contribuer à la provocation de tensions intercommunautaires, de violence et d’exploitation, entre autres impacts du changement climatique qui mettent les enfants en danger. Nous avons vu au Liban des exemples de conflits qui surgissent entre les communautés lorsque les ressources en eau sont rares. Par conséquent, l’UNICEF travaille avec l’Université américaine de Beyrouth et d’autres agences des Nations Unies pour rechercher et étudier comment les projets d’eau et d’assainissement peuvent être utilisés comme un outil pour réduire les tensions entre les communautés au Liban.

De son côté, le chercheur en sciences des eaux souterraines, le Dr Samir Zaghatiti, a estimé que les chiffres délivrés sur les quantités d’eau souterraine au Liban annoncés par le ministère de l’Énergie ces dernières années comportent de nombreuses erreurs. Le Liban stocke annuellement environ 3 milliards de mètres cubes sur environ 10 milliards, tandis que le ministère rapporte que c’est moins d’un milliard dans le but de construire des barrages à des fins personnelles, notant que de 1975 à aujourd’hui il n’y a pas de recherche scientifique officielle sur la richesse en eau. Tandis que les coûts des dépenses pour les eaux usées et les réseaux d’eau s’élevaient à environ 26 milliards de dollars, alors qu’il n’existe à ce jour aucun traitement pour les eaux usées, car elles sont soit rejetées dans le fleuve, soit dans la mer.

Zaghatiti a expliqué la réalité du Liban au cœur de la bordure orientale de la Méditerranée au sud de la région tempérée septentrionale, soulignant qu’il se caractérise par deux chaînes de montagnes parallèles, occidentale et orientale, qui jouent deux rôles essentiels et corrélatifs :

·      Former un barrage face à des nuages saturés de vapeur d’eau provenant de la mer et déposant d’importantes quantités de pluie sur les côtes et versants ouest, et de neige.

·      Créer une variation du climat, de méditerranéen sur la côte, à montagneux sur les versants occidentaux, à méditerranéen intérieur dans la vallée de la Bekaa, à semi-désertique au Nord-Est et à l’intérieur syrien.

 

Réservoirs d’eau souterraine :

Les gisements de roches carbonatées avec des fissures perméables, des fractures et des vides dissolvants se déploient sur environ 65 à 70 % de la superficie du Liban, et forment les hauteurs montagneuses et se répartissent comme suit :

L’eau souterraine, qui se renouvelle annuellement, s’écoule naturellement dans les roches du haut des zones de son infiltration vers le bas, c’est-à-dire vers la mer et les pays voisins, à moins que nous n’en investissions ce dont nous avons besoin, en creusant des puits.

L’investissement de l’entrepôt crayeux dans le sud du Liban s’est avéré un succès pour aux besoins d’un grand nombre de villages et de villes depuis 1985. L’investissement des eaux souterraines à Sidon, Tyr, Nabatiyeh, Marjayoun, Jezzine et Khiam s’est avéré être une alternative pratique qui peut être adoptée dans le reste des régions au lieu de mauvais barrages destructeurs pour l’environnement.

Erreurs de la politique de l’eau depuis 2010 :

1.     Les éléments sur lesquels s’appuie la « stratégie nationale du secteur de l’eau » révèlent l’étendue de la méconnaissance de notre richesse en eau et de la nature de son stockage souterrain.

2.     L’erreur de planifier les ressources en eau sans connaître la géologie du Liban et la nature des roches qu’il contient.

3.     L’erreur de compter uniquement sur le stockage peu profond dans des barrages à coûts élevés.

4.     L’utilisation du 1/4 des ressources en eau exposé à la pollution et délaissement des 3/4 des réserves transfrontalières.[GN1] 

5.     L’échec de six barrages à collecter l’eau, construits sur des terres karstiques sans études préliminaires, Barrage Brisa - Barrage Musailha - Barrage Bala’a Batroun - Barrage Jannat Ibrahim - Barrage Bekaata Kanaan al-Matn - Barrage Qaismani.

 

Les travaux sont contraires à ce qui avait été recommandé par la mission géologique française, l’ingénieur Ibrahim Abdel-Al, le Rapport sur le développement des Nations unies, et de nombreux chercheurs en hydrogéologie, étrangers et arabes.

L’absence de réseaux d’égouts et de traitement des eaux usées, et l’incapacité d’arrêter les matériaux industriels qui exposent les sources et les rivières à la pollution de surface, et l’exemple flagrant est celui de la catastrophe du Litani - Barrage de Qaraoun.

Pour sa part, le professeur de génie de l’environnement à l’Université islamique et au Centre libanais pour l’eau et l’environnement, Dr Nasser Farhat, a déclaré que les quantités de précipitations annuelles depuis plus de 70 ans sont toujours les mêmes et que le taux de changement est très faible. Jusqu’en 2020, selon le Conseil national de la recherche scientifique, le Liban reçoit environ 8,6 milliards de mètres cubes de précipitations par an, ce qui est un bon pourcentage par rapport au reste des pays de la région, mais le problème réside dans deux facteurs, le premier naturel et le deuxième humain. Les précipitations sont inégales, par exemple, la quantité atteint 200 mm à Baalbek-Hermel, alors qu’elle atteint 1300 mm dans les zones montagneuses, où le terrain joue un rôle majeur dans la différence de rapport entre les côtés Est et Ouest du Liban.

Farhat a estimé qu’environ 35 % de l’eau s’infiltre sous forme d’eau souterraine et 40 % s’évapore, tandis que le pourcentage restant se dissipe sous forme d’eau de surface, soulignant qu’une grande partie de l’eau sort des territoires libanais.

Quant au facteur humain, il se décompose également en facteurs liés à la démographie, à travers l’augmentation de la proportion de la population et au changement des coutumes et traditions qui ont provoqué une augmentation de la proportion d’eau consommée, et une pollution accrue des eaux de surface et souterraines, alors que la part d’eau douce, disponible et renouvelable par habitant a diminué à 835 mètres cubes par an, selon la Banque mondiale.

Selon une étude préparée par le Centre Libanais de l’Eau et de l’Environnement, 67 % de la population du Liban en 2017 dépendait du réseau public d’eau, alors qu’en 2007 le pourcentage était de 88,6 %, ce qui a poussé une grande partie des Libanais à dépendre du réseau privé au lieu du réseau public. Farhat a cité un échantillon de recherche dans le sud du gouvernorat de Nabatiyeh, qui a une superficie de 1 142 kilomètres carrés, et l’a divisé comme suit : le pourcentage de pluie est de 969 millions de m3, le taux d’évaporation est de 414 millions de met le pourcentage de l’eau stockée dans le sous-sol est de 374 millions de m3, tandis que le taux de consommation est de 50 millions de m3. Elle est répartie sur 19 millions de mpour l’agriculture, 35 millions pour les habitations et 3 millions pour l’industrie, tandis que la proportion des trois fleuves est de 338 millions de m 3, et 115 millions de msortent des frontières.

Farhat a souligné que les Libanais consomment peu d’eau, vu qu’ils paient directement pour obtenir de l’eau, car le pourcentage annuel est estimé à environ 125 millions de dollars par an, la consommation quotidienne par habitant étant de 200 litres, alors que dans le Golfe, elle est de 500 litres et en Europe entre 180 et 300 litres.

Le deuxième problème est celui des facteurs politiques, qui se divisent en internes et externes, en empêchant la mise en place de grands projets environnementaux en raison des tensions politiques, ce qui a entravé de nombreux projets importants pour les régions, alors que la situation est différente dans les gouvernorats du sud en raison de facteurs géopolitiques externes. Farhat trouve que les bailleurs de fonds refusent de financer tout projet d’eau dans la zone au sud du fleuve Litani qui affecte Israël, en particulier à Jabal al-Sheikh, où le pourcentage de terres agricoles négligées et pouvant être utilisées si des projets sont établis, atteint 70 %. 

Il a estimé que la solution réside dans le réalisme et le travail en vue de la réduction des projets dans le cadre des communes ou de l’union des communes, ce qui entrave toute intervention politique interne et externe, notamment dans les communes.

En ce qui concerne le changement climatique, Farhat a vu que les températures ont augmenté au Liban depuis 1990 d’environ 1,5 degrés Celsius, et cette augmentation a augmenté les taux d’évaporation et l’utilisation de l’eau par les gens dans l’agriculture et l’industrie.


A+
A-
share
Voir également
juin 17, 2024 par Jana Beydoun, Étudiante à l'Université Américaine de Beyrouth (AUB)
juin 17, 2024
par Jana Beydoun, Étudiante à l'Université Américaine de Beyrouth (AUB)
juin 17, 2024 par Elio Moubayed, Journaliste
juin 17, 2024
par Elio Moubayed, Journaliste
juin 02, 2024 par Abeer Marzouk, Journaliste
juin 02, 2024
par Abeer Marzouk, Journaliste
Charger plus